La Vraie Fausse Histoire de Sir Alec Issigonis et son Temps – épisode 1
1906
Les personnages :
Edward VII, ex prince de Galles, souverain du Royaume-Uni,
son 1er Ministre, sir Henri Campbell-Bannerman
- Votre Majesté, je reçois un câble de Smyrne annonçant que Mr Demosthenis Constantine Issigonis est père d'un petit garçon.
- Smyrne, c'est encore grec, ça ?
- Non, votre majesté, les Turcs l'ont repris.
- Ah ! merde … by jove, veux-je dire ! Ils vont nous courir sur le haricot longtemps, ces Turcs !? On est en bisbille avec eux, et on s'entend bien avec les Grecs !
- les Turcs gênent notre expansion au Moyen-Orient, certes, Majesté.
- Parfaitement ! Ils nous empêchent de nous établir confortablement … les aime pas, na ! Mais, au fait, pourquoi me parliez-vous de Demo … Issi … machin ?
- Demosthenis Issigonis ; c'est un citoyen britannique, votre majesté … et un de nos espions.
- Heu … je connais quelques uns de nos espions, notamment un certain Jeremy Bond (qui n'a pas encore de fils … mais cela viendra … quand il se décidera à rester avec une femme !)
- Votre Majesté, personne n'est au courant, sauf moi, que notre homme à Smyrne est un espion. Même lui ne le sait pas !
- Ah oui ! Mais, alors quelle est l'utilité ?
- Si personne ne le sais, même pas lui, les Turcs ne le sauront pas non plus, votre Majesté.
- C'est très fort, c'est subtil !
- C'est anglais, votre Majesté.
- Je lui ferais bien envoyer des fleurs blanches, pour la naissance du petit …
- N'en faites rien, Majesté, ce geste révélerait son rôle !
- Merde, c'est vrai !
- Heu … Votre Majesté ne devrait pas dire "merde" à tout bout de champ ! C'est trop nous rappeler un général de ce Napoléon qui nous a mis tant de branlées !
- Well, well, vous avez raison sir Campbell … Mais au fait, quels renseignements nous rapporte Demosthenis … heu … Issigonis ?
- Aucun, votre Majesté, ignorant qu'il est espion, il n'espionne pas !
- C'est très fort !
- Et de fait, votre Majesté, si les Turcs l'arrêtent, ils ne chercheront pas à le faire parler pour ne rien leur dire !
- Heu … je ne vous suis pas très bien mon cher 1er Ministre ?
- Alors, voyez : si votre Majesté qui est très intelligente … si, si, le peuple le dit ... ainsi qu'une petite française des Folies Bergères (que votre Majesté rencontrât pendant sa visite à Paris), si, donc, votre Majesté qui est très intelligente ne comprend pas cette fine complexité, imaginez les Turcs ! Hu hu hu !
- Vous avez raison. Donc pas de fleurs pour le petit ... au fait, comment se prénomme-t-il ce bambin ?
- Son père voulait un prénom court, facile à retenir : Jo. Mais, sa mère voulait que ça fasse plus british.
- Alors ?
- Il s'appelle Alexander Arnold Constantine ... et, votre Majesté, il est sujet britannique !
- Very well, indeed ! espérons qu'il fera quelque chose de sensationnel pour notre pays !
- God saves the Queen ... heu ... the King !
La Vraie Fausse Histoire de Sir Alec Issigonis et son Temps – épisode 2
- Votre Majesté, les journaux annoncent qu'une Renault a remporté le Grand Prix de France.
- J'eus préféré que ce fût une Napier, ou une Wolseley !
- Certes, certes ! Une voiture anglaise eut remporté le prix, votre Majesté décrétait alors une journée de liesse nationale.
- le peuple se serait saoulé pendant 24 h ! Et il m'aurait aimé !
- Les journaux mentionnent aussi que le modèle AG 8 cv bicylindre de Renault va atteindre sa 1500 ème commande ... pour des compagnies de taxis, principalement.
- Et alors ! Des taxis, des taxis, y a pas de quoi en faire une histoire !
- une histoire, non, Votre Majesté, mais ... l'Histoire, peut-être ?
- Comment des taxis peuvent-ils bien rentrer dans l'Histoire, je me le demande ?!
- Tout rentre dans l'Histoire, Votre Majesté ; tenez, pensez à la culotte du roi de France Dagobert, parce que ce con l'avait enfilée à l'envers !
- Ah !ces Français !
- Cependant, votre Majesté a un petit faible pour la Françe ... surtout les Françaises ... et les Renault, isn't ?
- Yes, depuis mon voyage à Paris pour sceller l'Entente Cordiale, où je fus invité par Delcassé et Clémenceau.
- Vous fûtes protégé par des Brigades spéciales, dites du Tigre, et leurs voitures, comme celle qui baladât votre Majesté étaient des Renault.
- Oui, des Renault. Ha ! Paris, mon cher premier Ministre ! Paris, ses petites femmes, les Folies Bergères, le Moulin Rouge !!!!
- Oui, votre Majesté s'envoyait souvent en l'air ! L'on m'a rapporté les petites panouilles de sa Majesté au Claridge !
- J'y retournerai, je l'espère !
- Je fus tout de même étonné, votre Majesté.
- Etonné de quoi ?
- Qu'avec ces petites sauteries, votre Majesté ne se soit pas ramassé une vérole de 1ère.
- Mais non, mon cher, je ne risquais rien, car... God saves the King !
- Il est vrai, il est vrai.
- Recevez-vous des nouvelles de notre agent à Smyrne ?
- Non, votre Majesté, puisqu'il n'y a pas de raison qu'il nous en donne.
- C'est vrai qu'il ignore qu'il est espion.
- Donc, pas de nouvelles de sa part, bonnes nouvelles ! Cependant, votre majesté, j'en reçois de son voisin, à Smyrne.
- Son voisin ?
- Oui, un voisin espionne Démosthénis Issigonis.
- Nous avons donc à Smyrne un espion qui espionne un autre espion qui n'espionne pas parce qu'il ne sait pas qu'il est espion !?
- Oui, votre Majesté.
- Décidément, cela me dépasse !
- les Turcs sont encore plus dépassés, votre Majesté !
La Vraie Fausse Histoire de Sir Alec Issigonis et son Temps – épisode 3
4 août 1914 –
Les personnages :George V, succédant à Edouard VII,
le Premier Ministre : Herbert Henry Asquith
- Ca y est ? Vous avez accusé réception de la déclaration de guerre de Guillaume ?
- Oui, votre Majesté, et je ne me suis pas trompé de n°.
- Comment cela ?
- J'ai bien adressé la lettre comme quoi on avait pris acte de la déclaration de guerre allemande, à Guillaume II , pas 1er.
- Vous êtes précieux, mon cher Comte d'Oxford et premier Ministre ! Les Turcs, vous pensez qu'ils s'allieront à l'Allemagne ?
- C'est certain, votre Majesté. Le voisin espion d'un de nos espions, Démosthenis Issigonis, celui qui n'espionne pas parce qu'il ne sait pas qu'il est espion, nous câble que notre homme s'est pris de gueule, quelque chose de mastard ! avec un militaire turc.
- Ah bon ?
- Votre Majesté sait qu'Issigonis fabrique des moteurs et des pompes, pour les bateaux.
- Ha c'est lui, donc ? Mon runaboard est équipé d'un moteur portant la marque D. Issigonis.
Je m'éclate avec sur la Tamise, mon cher Herbert ! J'éclabousse les pêcheurs en leur passant à ras des guiboles ... c'est fun à souhait ! Parfois, je ramasse quelques morues qui traînent sur les quais ... et je n'ai même pas besoin de puiser dans les caisses de la Grande Bretagne : quand elles reconnaissent leur roi, elles sont ravies de se donner à l'oeuil ! harf harf harf !
- Hm hm ... donc, votre Majesté, Issigonis s'est engueulé copieusement avec un militaire turc qui lui reprochait que son moteur avait des ratés.
- " Des ratés ! les moteurs que je fabrique n'ont jamais de ratés, Môssieur, c'est vous qui êtes un raté ! "
- " Vous allez voir, vous les Anglais de la communauté grecque de Smyrne – que nous occupons, nous autres Turcs, ne l'oubliez pas ! – nous allons nous joindre à l'Allemagne pour vous emmerder un max et vous foutre une tisane dont les Français et vos compatriotes anglais ne se remettront pas de si tôt ! "
- " Va donc, métèque !" qu'il lui répondit notre Issigonis.
- " Et, toi, rosbif olivâtre !" que l'autre gravos lui rétorque.
- " Mou du bide !"
- " Va te faire empapaouter chez les Grecs !" lance le Turc.
Comme Issigonis est hellène, il ...
- Hélène ? C'est une femme ... un homme un peu nana quand ça lui chante, comme le Chevalier d'Eon ... vous savez, cet espion Français, sous Louis XV … Ah ! ces Français !
- Non, votre Majesté, Issigonis est d'origine hellénique ... grecque ... c'est un Grec, naturalisé Anglais.
- J'avais oublié ... comme j'avais oublié qu'il est espion, sans l'être, mais que son voisin l'est pour deux, etc ... c'était une idée de votre prédécesseur, sir Campbell, sous le règne de mon père, Edouard.
Démosthénis a un fils, je crois ?
- Oui, votre Majesté, Alexander Arnold Constantine.
- C'est beaucoup trop long, ça ; nous le surnommerons, voyons ... Alex, ... Arnold, ... Constantine ... ALEC ! c'est un concentré des trois prénoms. Mais, ça restera entre nous, Herbert.
- Votre Majesté, il me surprendrait que quiconque le prénomme ainsi dans le futur ! Et quand bien même !
La Vraie Fausse Histoire de Sir Alec Issigonis et son Temps – épisode 4
Les mêmes personnages, soit : George V, roi de Grande Bretagne,
Le Premier Ministre, Herbert Henry Asquith.
Septembre 1914
- Des nouvelles du front, mon bon Herbert ?
- Votre Majesté, les Français ont repoussé les Allemands au-delà de la Marne.
- Très bien, très bien, ces petits Français !
- Et, tenez-vous bien Sir, Votre Majesté va en être sur le cul : les soldats sont arrivés en taxis !
- Wonderfull ! By jove ! Ainsi, votre prédécesseur avait raison : il prévoyait un coup fumant avec les Renault AG 8 cv.
D'autres nouvelles ?
- Un jeune lieutenant vient de publier son rapport sur la mission hum ... "archéologique" qu'il effectua avec L. Woolley dans le nord du Sinaï ... en fait, il s'agissait également d'une mission de reconnaissance sur les activités turques dans la zone du canal de Suez.
- Comment se nomme ce freluquet ?
- Theodore Edward Lawrence, Votre majesté.
- Je n'ai jamais entendu parler de lui !
- Heu … il n'a pas encore réellement fait parler de lui, votre Majesté, mais quelque chose me dit que ça ne va pas tarder ! Il est actuellement au Département Géographie du contingent du Caire ; c'est un érudit, et il parle arabe.
- Il faudra alors penser à lui pour une mission d'importance.
- J'ai reçu des nouvelles des Issigonis, votre Majesté.
- Ah oui, par son voisin de Smyrne ?
- Tout juste, votre Majesté. Demosthenis s'engueule toujours avec les Turcs. Il leur dit qu'il serait possible que Smyrne revienne aux Grecs à l'issue de la Guerre, etc ... Son fils Alec, 12 ans déjà !, ne va pas à l'école.
- Ben oui, son père ne veut pas l'envoyer dans une école turque ! Ni une école anglaise, s'il y en a une à Smyrne
- Alec a un précepteur qui vient au domicile de la famille prodiguer son enseignement au garçon. Il est brillant, paraît-il. Par exemple, il a disposé en travers de la pièce son pupitre d'écolier. Son précepteur lui a demandé : pourquoi ? Pour gagner de la place dans la carrée, a-t-il répondu !
- Very good, indeed ! Et si je disposais ainsi mon bureau ?
- Votre Majesté plaisante ! Son office est suffisamment spacieux pour y loger un dirigeable ! Mais, la cuvette des chiottes, en travers, dégagerait de la place, effectivement.
- Je pourrais y bouquiner ... Quoi d'autre, mon cher 1er Ministre ?
- Un jeune ressortissant anglais, émigré aux Etats-Unis, fait fureur dans la production cinématographique.
- Ah oui ! Et quel est ce prodige ?
- Charles Chaplin, votre Majesté.
- Il fait fureur aux Etats-Unis alors qu'il était en Angleterre auparavant ! Mais, mille bordels, pourquoi s'est-il barré ? N'y avait-il pas dans mon royaume, un gravos moins con que les autres pour s'apercevoir qu'il ferait un tabac ce Chaplin !?!?
- Heu, il ne pratiquait pas l'humour anglais, votre Majesté.
- Ah ... alors, il est bien là-bas, finalement !
La Vraie Fausse Histoire de Sir Alec Issigonis et son Temps – épisode 5
1916
Les mêmes personnages : George V, roi de Grande Bretagne,
Le Premier Ministre, Herbert Henry Asquith.
- Votre Majesté, nos blindés font des dégâts sur le front ; les chars Renault sont plus légers, plus mobiles, mais notre blindage est plus épais ; il est vrai qu'on s'embourbe plus facilement, hélas ! !
- Well ! D'autres nouvelles, mon cher Premier Ministre .
- ... les alliés seraient heureux de mettre la main sur Mata Hari.
- Qui est-ce donc que cette Mata Hari ?
- Margareth Gertrude : il s'agirait d'une espionne pour le compte de l'Allemagne, votre Majesté.
- Ha !
- Une très jolie femme ... la peau laiteuse, des cheveux châtains virant à l'auburn !
- Hm ...
- Et avec un petit grain de beauté ...
- Sur le sein gauche ?
- Heu ... oui, votre Majesté !
- My God ! Et zut et zut ! C'était donc cela !
- Quoi donc, votre Majesté ?
- Cette grue que l'on m'avait présentée lors d'une réception. A la fin de la soirée, je l'avais emmenée dans mes appartements, puis pendant que je l'honorais, elle me demanda combien l'Angleterre avait de cuirassés pouvant prendre part au combat.
- Etonnant, votre Majesté !
- J'ai cru là à quelque fantaisie de sa part ; je lui ai répondu : " l'Angleterre n'a qu'un cuirassé, son roi ! "
- " Et quelle puissance de feu ! a-t-elle ajouté "... j'étais flatté ! Mais, au fait, Herbert, comment savez-vous qu'elle a un grain de beauté sur le sein gauche ?
- Heu ... votre Majesté, j'ai eu la faiblesse de ... enfin, je l'ai sautée aussi ... mais après sa Majesté ! Et puis, quand elle m'a parlé, à moi aussi, de notre flotte, je suis resté très évasif, j'ai joué au con : " Ah ! oui ? qu'est-ce que c'est un cuirassé ? " que je lui ai dit ". Elle n'est plus revenue me voir. Mais, j'espère que le Ministre de la Guerre aura été aussi discret.
- Comment, le Ministre de la Guerre également !
- Oh, votre Majesté, elle aurait bien grimpé le Ministre de l'Agriculture si elle avait pu lui soutirer quelques renseignements utiles !
- Nous avons un Ministre de l'Agriculture ?
- Heu ... à vrai dire, je n'en sais rien, votre Majesté.
- Ce serait bien qu'il y en ait un. D'autres nouvelles ?
- Votre Majesté se souvient de Theodore Lawrence ? Eh bien, il a avoiné les Turcs quelque chose de bien !
- Racontez-moi cela ! Mais avant, il faut que j'aille pisser.
- Votre Majesté n'a pas oublié qu'elle doit recevoir l'ambassadeur des Pays-Bas ?
- Non, non, je n'ai pas oublié. Au fait, excellente idée, que celle du petit Issigonis ! : en faisant disposer la cuvette des chiottes en travers, j'ai vraiment gagné de la place dans mon cabinet .... Voilà, j'en ai terminé. Vous me raconterez l'épopée de Lawrence après que j'aie reçu l'ambassadeur, n'est-ce pas ?
- Je ne laisserai pas languir sa Majesté ! ... mais ... je
Le huissier : Son excellence l'ambassadeur des Pays-Bas !
- Faites entrer !
- Psstt .... votre Majesté !
- Bonjour Monsieur l'ambassadeur.
- Mes respects, votre Majesté !
- ... Psstt ... votre Majesté !
- Monsieur l'ambassadeur, comme vous l'avez déjà constaté et comme vous allez encore le constater, je suis ouvert ....
- ... Psstt ... votre Majesté !
- Quoi donc, mon cher Premier Ministre ?
- La braguette de votre Majesté est béante !
FIN de la 1ère Partie
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Sujet: La Vraie Fausse Histoire de Sir A. Issigonis et son Temps I 
16/4/2008, 14:15